Réflexion sur mon cheminement


En début de carrière en enseignement, on doit gérer à la fois :
  • le curriculum
  • le temps
  • les élèves
  • et j'en passe...
Ce sont beaucoup de balles à jongler en même temps. Je me souviens à quel point je revenais à la maison épuisée. La sieste était absolument nécessaire à la fin de la journée (et je n'étais même pas enceinte à ce moment là!).


Avec les années, on oublie un peu tout ce qu'on doit gérer en même temps. Ça devient naturel. On devient expert (ou presque) dans notre matière, notre horloge interne se synchronise avec celle de l'école et la gestion de classe est seconde nature.

Par contre, ça a pris une journée raccourcie, où le rythme de nos cinq cours était accéléré, pour vivre un retour en arrière intéressant (en bon canadien-français, un flashback). Laissez-moi vous partager cette anecdote qui aurait pu être tirée d'une des pages de mon journal de première année d'enseignement. 

(À lire à pleine vitesse, pour rendre la situation plus authentique)

Puisque le cours était raccourci, j'ai pris ma voix ultra-rapide espérant de ne perdre personne. Je devais présenter une nouvelle tâche sommative et faire vivre aux élèves des exercices d'échanges. J'ai vite distribué les feuilles de consignes aux élèves, gérant aussi les plusieurs feuilles des élèves absents, tout en donnant des consignes à voix haute.
Un élève me regarde l'air confus, réalisant qu'il n'avait pas devant lui la tâche de présentation orale, mais bien le test de lecture de la semaine prochaine que je venais tout fraîchement de photocopier ce matin. Mes piles de copies s'étaient mélangées à un certain point j'imagine. Au lieu de jouer l'enseignante d'expérience qui ramasse discrètement les copies sans trop en faire un cas (comme je ferais à l'habitude)... je me suis sentie transportée dans le temps et la jeune enseignante a pris contrôle de mon corps.
Panique totale! Prise par les émotions, je me suis écriée : Ah non, c'est le test de lecture!  Non, ne regardez pas les questions! Vite redonnez-moi les copies!
Heureusement, je suis rapidement revenue sur Terre, ou plutôt dans le moment présent, une fois que mes copies avaient toutes été replacées précieusement dans mon classeur. Le cours s'est continué comme à l'habitude. Par contre, je dois admettre que j'étais un peu embarrassée. Mes élèves ne m'avaient jamais vue comme ça. J'ai réalisé comment il était maintenant rare que je laisse mes émotions prendre le dessus, contrairement au stress que je ressentais en première année de carrière... mais aussi à quel point les hormones de grossesse me font vivre des hauts et des bas (au cas où vous ne l'auriez pas déduit, je suis 6 mois enceinte).
Je me suis donc excusée aux élèves d'avoir été si émotive. Ils ont tout à fait compris, ne semblant pas être trop surpris que leur enseignante enceinte venait finalement de faire un vrai freak out de femme enceinte. Mais ce qui a fait ma journée a été le commentaire d'un élève, reconnu pour son sens de l'humour, qui m'a dit : Madame, je dois admettre que c'était un peu drôle.
 J'ai ris. Il a ris. Nous avons tous ris ensemble.

Et voilà! En enseignement, il faut en avoir un sens de l'humour. C'est quelque chose que j'ai réalisé avec les années. Non seulement qu'il faut pouvoir rire de soi, mais il faut aussi être flexible (puisque les imprévus sont prévus en enseignement) et savoir garder son sang froid (parce que les ados de 8e année trouvent ça bien trop drôle de voir leur enseignante freaker). 

C'est drôle comment la contrainte de temps d'aujourd'hui, combinée à l'inconnu du nouveau projet que j'avais à présenter, m'ont fait revivre une époque de ma carrière que j'avais laissée loin derrière. Mais ça nous arrive à tous, de temps en temps. C'est pourquoi il faut en rire.

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